Le Val Ygot : L’histoire secrète des bases de lancement de V1 en Normandie (forêt d'Eawy)

Description de l'article de blog :

HISTOIRE

12/7/202410 min temps de lecture

Aujourd’hui, je vais vous parler d’un coin un peu spécial près de chez nous : le Val Ygot, une ancienne base de lancement de V1 caché dans la forêt d’Eawy. Si vous aimez les histoires de la Seconde Guerre mondiale ou juste les trucs qui ont marqué notre région, accrochez-vous, c’est passionnant !

C’est quoi le Val Ygot ?

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands avaient une idée bien tordue : balancer des bombes volantes, les fameux V1, sur l’Angleterre. Ils ont donc construit des bases un peu partout dans le nord de la France, et l’une d’elles, c’est le Val Ygot, à deux pas de la forêt d’Eawy.

Ici, les mecs avaient tout prévu : une rampe de lancement pour envoyer les V1, des dépôts pour stocker les explosifs et le carburant, et même des chemins bétonnés pour déplacer leurs missiles. Tout ça bien planqué sous les arbres, histoire de ne pas se faire repérer par les avions alliés.

Le plan des Allemands (qui a bien foiré)

Les Allemands ont commencé à construire le Val Ygot en 1943. Leur objectif ? Bombardé Londres avec leurs V1. Les bombes étaient montées sur une rampe inclinée et catapultées pour qu’elles filent tout droit sur l’Angleterre. Pratique, non ? Enfin… sauf que ça n’a jamais marché ici. Pourquoi ? Parce que les Alliés avaient les yeux partout.

Quand les Alliés ont tout pété

Dès que les avions de la RAF ont repéré la base, c’était fini pour les Allemands. Avec l’aide de la Résistance française, ils ont bombardé le Val Ygot à plusieurs reprises. Vers fin décembre 1943, ils ont carrément balancé un gros raid qui a foutu un bazar monstre. Avec 270 bombes larguées juste avant sa mise en service, conduisant à son abandon.

Résultat : la rampe de lancement est endommagée, les dépôts explosent, et les cratères causés par les bombes sont encore visibles aujourd’hui. Les Allemands n’ont même pas eu le temps de lancer un seul missile depuis ce site. Bien joué, les Alliés !

Après des bombardements alliés, sans date exacte, source : battlefieldsww2

Photographie aérienne entre 1950 et 1965

Après les bombardements des rampes lourdes de V1, les Allemands ont abandonné ce projet et ont installé dix pistes légères en plein cœur de la forêt. Le truc, c’est que ces pistes étaient super difficiles à repérer pour les avions, donc elles ont été mises en service assez vite. Par contre, celle de Muchedent n’a jamais fonctionné. Et c’est comme ça que des dizaines de V1 ont été lancées de la forêt d’Eawy vers Londres, parfois même en même temps, depuis ces lieux:

  • (42) MAUCOMBLE : Carrefour 118

  • (43) ARDOUVAL : Le Chatelet

  • (44) LES GRANDES VENTES : Route de la Loge

  • (45) LES GRANDES VENTES : Le chemin Coursier

  • (46) LES GRANDES VENTES : La route Charlemagne

  • (47) LES GRANDES VENTES : Le Fond des Six Frères

  • (48) LES GRANDES VENTES : La route du Four

  • (49) LES GRANDES VENTES : La Laie Madame

  • (50) MUCHEDENT : Le Pubel

  • (51) FREULLEVILLE : Le Croc

= Centres d'approvisionnement de Saint-Martin-l'Hortier(La Croix au Guet), de Rosay (Camp Cusson) et de Dieppe (impasse Labbe ).

Mais pourquoi le Val Ygot, hein ?

Alors, pourquoi bombarder un coin paumé comme ça ? Parce que les V1 étaient des armes redoutables. Imaginez une bombe volante qui peut atteindre 580 km/h et qui explose en rasant des quartiers entiers. Londres a quand même pris cher avec les V1 lancés depuis d’autres bases (entre 6000 et 9000 victime estimé et entre 17000 et 20 000 blessé). Mais grâce à des frappes préventives comme celles du Val Ygot, les Alliés ont limité les dégâts.

Aujourd’hui, un lieu chargé d’histoire

Si vous allez au Val Ygot maintenant, vous pouvez encore voir les vestiges de cette époque. Il y a la rampe de lancement (en partie reconstituée), des bunkers en béton, et même une réplique grandeur nature d’un V1. Le tout est bien aménagé avec des panneaux explicatifs qui racontent l’histoire du site.

Vous pouvez vous balader tranquillement dans ce coin chargé d’histoire. Et si vous êtes attentifs, vous verrez même les cratères laissés par les bombardements alliés. Ça donne une bonne idée de la violence des combats, même si c’est en pleine campagne.

Vous avez également la possibilité de profiter de visites guidées grâce à l'association ASSVYA, qui gère les lieux de fin mars à fin septembre (sur réservation). L'association dispose d'une page Facebook, n'hésitez pas à leur rendre visite pour plus d'informations et pour réserver votre visite

Pourquoi ça vaut le détour ?

Honnêtement, le Val Ygot, c’est une petite pépite pour ceux qui s’intéressent à l’histoire locale. Pas besoin d’être un passionné de guerre pour apprécier le lieu. C’est calme, instructif, et franchement, ça fait réfléchir sur ce qui s’est passé ici, pas si loin de chez nous.

Découverte du Site

Alors, en te baladant sur le site, tu vas vraiment tomber sur plusieurs vestiges et monuments commémoratifs qui racontent plein d'histoires.

Le Mémorial aux Victimes et celui des requis et prisonniers

En entrant, tu pouvais voir un monument super émouvant : c'était une sculpture représentant une personne pleurant en tenant un enfant. Ce monument rendait hommage aux victimes des V1, ces civils qui ont quitté ce monde trop tôt. Malheureusement, cette statue a été volée, ajoutant une autre couche de tristesse à cet hommage poignant. Cette statue était un rappel du lourd tribut payé par les civils pendant cette période sombre, et de la fragilité de ces lieux de mémoire.

Suivit par un autre mémorial dédié à ceux qui ont été forcés de travailler ici. Pendant la guerre, les Allemands ont utilisé des prisonniers pour construire ces installations, souvent dans des conditions vraiment difficiles.

L'Atelier d'Assemblage des V1

Après ça, on se dirige vers l’un des bâtiments principaux : l'atelier d'assemblage. C’est ici que les V1, qui arrivaient en pièces détachées, étaient montés. Je te laisse lire ce que dit le panneau explicatif :

Atelier d'assemblage en 3 compartiments :

Premier compartiment : montage

Second compartiment : réparation

Troisième compartiment : stockage des pièces

Exemple d'assemblage de V1 Source : linternaute.com

Le montage des V1, ces redoutables "bombes volantes", était un processus minutieux qui se déroulait étape par étape dans le bâtiment d’assemblage. Voici comment ça se passait :

Tout commençait par la réception des composants. Le fuselage, les ailes, le moteur pulsoréacteur et l’ogive arrivaient séparément sur le site. Ces pièces étaient d’abord entreposées en attendant leur montage.

Ensuite, place à l'assemblage du fuselage. Les deux sections principales, avant et arrière, étaient réunies. À l’intérieur, on installait les réservoirs de carburant, essentiels pour alimenter le moteur, ainsi qu’un système de guidage – un pilote automatique basique mais suffisant pour envoyer le V1 vers sa cible.

Puis venait le montage du moteur pulsoréacteur, ce fameux moteur fixé à l’arrière du fuselage, reconnaissable à son bruit caractéristique en vol. C’était lui qui assurait la propulsion du missile.

L’étape suivante, la fixation des ailes, permettait de stabiliser le missile une fois en vol. Pas de GPS ni de gadgets modernes ici, juste un design simple et efficace pour atteindre sa cible.

Enfin, on passait à l’installation de l’ogive explosive, une étape délicate. Cette ogive, contenant près de 850 kg d’explosifs, était montée à l’avant du missile avec la plus grande précaution.

Une fois tout vérifié et validé, le V1 était prêt à être transporté vers la rampe de lancement pour son dernier voyage.

Plan de coupe détaillé du missile V1, montrant les principaux composants techniques

Les Abris de Stockage en Forme de Ski

En continuant notre visite, on tombe sur un abri de stockage qui a une forme de ski, typique des sites de lancement de V1. Ces abris mesuraient 80 mètres de long et 4,30 mètres de large. Ils étaient conçus pour dévier le souffle des bombes avec leur extrémité recourbée. Ils pouvaient abriter jusqu'à dix V1, bien alignés.

Le panneau explique :

Suite aux bombardements, ces trois abris sont restés inachevés. Leur forme de ski était destinée à dévier le souffle des bombes.

Il ne reste plus que la dalle en béton, mais on peut vraiment imaginer à quoi il ressemblait autrefois. Cette forme était conçue pour dévier le souffle d'une explosion grâce à sa courbe.

Exemple de bâtiment fonctionnel, source : 2emeguerremondiale

L'Abri d'Alimentation du Site

En continuant notre exploration, on arrive devant un grand bâtiment en béton : l’abri d’alimentation. C’était ici que se trouvaient un groupe électrogène, un compresseur et une pompe à eau pour alimenter tout le site en énergie et une station de carburant

À l'intérieur, on peut voir un groupe électrogène monté sur des rails. Les inscriptions en allemand ajoutent une touche authentique. Et au sol, il y a des rails utilisés pour transporter les V1 d’un bâtiment à l’autre.

Les Bâtiments de Stockage des Produits pour le Lancement

Nous découvrons un autre édifice en béton : Cet entrepôt abritait des substances essentielles au fonctionnement des V1, telles que le permanganate et le peroxyde d'hydrogène, stockées dans des récipients spécifiques.

Ce bâtiment devait être particulièrement renforcé pour contenir d'éventuelles explosions en cas de fuites de carburant. Aujourd'hui, il est quasiment recouvert de terre, ce qui lui confère un aspect imposant. Les murs épais témoignent de l'importance de protéger ces substances sensibles.

La rampe de lancement.

La rampe de lancement du V1 au Val Ygot, c’est vraiment le clou du spectacle de ce site historique niché en pleine forêt d’Eawy. Construite en 1943 par l’Organisation Todt, elle mesure 42 mètres de long avec une inclinaison de 8 à 10 degrés, idéale pour donner à un missile l’élan nécessaire pour filer droit vers Londres, comme un train lancé à toute vitesse. Orientée directement vers la capitale anglaise, la cible préférée des V1, elle fonctionnait avec une catapulte à vapeur capable de propulser un missile à 300 km/h en une seconde – même les fusées modernes pourraient être jalouses. Aujourd’hui, grâce au travail des bénévoles, la rampe a été restaurée et un V1 grandeur nature est exposé. Pas d’inquiétude, celui-là reste cloué au sol.

Le chargement du v1 sur sa rampe

Une fois prêt, il était placé sur un chariot conçu pour glisser parfaitement sur les rails de la rampe. Ce chariot, avec le V1 dessus, était ensuite hissé au sommet de la rampe à l’aide d’un treuil ou d’un système manuel, bien aligné pour son grand départ.

Une fois en position, le V1 était connecté à la fameuse catapulte à vapeur, un système impressionnant qui utilisait une réaction chimique pour produire une poussée énorme. Les techniciens procédaient alors aux derniers réglages : le guidage, la charge explosive et toutes les vérifications nécessaires. Une fois tout validé, la catapulte était déclenchée, propulsant le V1 le long de la rampe à une vitesse folle, jusqu’à ce que son moteur s’active et prenne le relais.

si vous vous retournez, vous pourrez apercevoir le poids étalon utilisé avant de lancer un V1. Les Allemands utilisaient ce poids spécial pour tester la catapulte. Ce poids, appelé "Bumskopf", simulait le missile

réel pour s'assurer que tout fonctionnait bien. En gros, ils faisaient un essai à blanc pour vérifier que la catapulte pouvait propulser le V1 correctement. C'était une étape cruciale pour éviter les ratés lors des vrais lancements et garantir la sécurité de l'équipe au sol.

Un mot pour finir ?

Le Val Ygot, c’est un bout de notre histoire qui mérite d’être connu. Alors, si vous avez une après-midi de libre, allez-y ! C’est gratuit et idéal pour apprendre en se promenant.Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne a développé des technologies impressionnantes et construit des infrastructures complexes en un temps record. En visitant ce site, on pense à toutes les personnes touchées et aux enjeux de cette époque.

Si vous y allez, dites moi ce que vous en avez pensé. 😉

Plan des sites v1 autours de la forêt et des dépots

Sculpture dérobé